Toutes les deux minutes, une femme meurt de complications liées à la grossesse ou à l’accouchement. Cela signifie qu’au moment ou vous atteindrez la fin de ce blogue, quatre femmes sont mortes en donnant naissance à un enfant.
En outre, pour chaque femme qui meurt en couches, environ 20 autres souffrent de blessures, d’infection ou de maladie – quelque 10 millions de femmes chaque année. Et ce n’est pas tout, 99 % de ces décès surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, où cela constitue souvent une cause majeure de décès chez les femmes en âge de procréer. Le détenteur du triste record est l’Afrique subsaharienne, où l’on observe les taux les plus élevés de mortalité maternelle.
Ces chiffres sont renversants, pour dire le moins. Voilà pourquoi la santé maternelle, ainsi que la santé du nourrisson et de l’enfant, demeurent une priorité de développement pour le Canada. Une action mondiale a été amorcée par le lancement de l’Initiative de Muskoka, pilotée par le Canada, et sous le leadership du Canada, les taux de mortalité maternelle sont en baisse. Mais il reste beaucoup de travail à faire.
Grands Défis Canada (qui est financé par le gouvernement du Canada) soutient plus de 70 projets (pour un investissement total de 39 millions $) qui visent à éliminer les décès évitables chez les femmes des pays en développement. À l’occasion de la fête des Mères (10 mai), nous voulons mettre en évidence quelques-unes de ces idées audacieuses à grand impact qui produisent des résultats.
Dans le cadre de notre programme Les Étoiles en santé mondiale, nous appuyons une innovation en Ouganda visant à lutter contre la mortalité maternelle, où le taux n’a guère changé au cours des dix dernières années, soit 438 décès pour 100 000 naissances. Cela se traduit par plus de 6000 décès maternels chaque année.
Un facteur important responsable de ce taux élevé de mortalité est le fait que plusieurs femmes en Ouganda donnent encore naissance à la maison malgré les efforts déployés pour encourager les accouchements en établissement. En outre, le manque de participation des partenaires masculins à la préparation à la naissance semble constituer un problème. Dans de nombreux ménages, les hommes ont tendance à être responsable des décisions importantes comme les finances, le transport et le choix d’un établissement. Cependant, la plupart des programmes de santé maternelle et infantile se concentrent uniquement sur les besoins de santé des femmes et des enfants, en ignorant les hommes.
Des innovateurs de l’Université de Makerere en Ouganda ont développé une approche intégrant les hommes pour fournir des services de soins prénatals et d’éducation sanitaire aux conjoints de sexe masculin, dans le but d’améliorer la préparation à l’accouchement et les résultats postnatals pour la mère et le bébé. 670 couples dont la femme en était à entre 2 et 6 mois de grossesse ont participé à l’étude. Les résultats ont montré une corrélation positive entre la formation donnée aux hommes et une meilleure préparation à la naissance, ainsi que de meilleurs résultats sur le plan de la santé. Cela a aussi aidé ces familles à économiser de l’argent pour le transport, à acheter des fournitures appropriées et à rechercher des services qualifiés pour l’accouchement.
La plupart des décès maternels sont évitables car ils sont dus à des facteurs modifiables pour lesquels il peut exister des solutions simples, comme la télésanté (mHealth). L’Université de la Colombie-Britannique mène un projet au Mozambique, appelé MOM (cartographier les résultats pour les mères), une application de télésanté qui intègre des méthodes de cartographie géographique pour créer une image de la santé maternelle à partir des contextes social et physique locaux. Le projet MOM génère un profil de risque pour chaque femme et sa collectivité. MOM est unique parce qu’il aborde le risque lié à la grossesse sous quatre dimensions : 1) l’environnement social; 2) l’environnement physique; 3) le système de soins de santé; 4) les caractéristiques individuelles de la femme. Il définit les influences positives et négatives et la façon dont elles interagissent pour engendrer un risque.
Le projet a réussi à produire un cadre opérationnel à l’aide d’un système d’information géographique (SIG) pour cartographier les résultats maternels et les déterminants connexes. Au total, 80 506 femmes en âge de procréer ont été interrogées afin de cerner cinq variables clés liées aux résultats maternels : la disponibilité du chef de ménage, la disponibilité du transport privé, l’état matrimonial, le temps de conduite jusqu’à la route principale la plus proche et le temps de conduite jusqu’au centre de soins de santé primaires le plus proche. L’application de télésanté MOM sera utilisée pour remettre aux agents de santé communautaires une liste de facteurs de risque et des recommandations spécifiques à la collectivité.
Trouver de solutions inédites, pouvant être déployées à grande échelle, à la mortalité maternelle au moment de la naissance dans les collectivités pauvres et difficiles à rejoindre est l’un des objectifs du partenariat Sauver des vies à la naissance, qui réunit Grands Défis Canada, l’Agence américaine pour le développement international (USAID) , le gouvernement de la Norvège, la Fondation Bill & Melinda Gates et le Département du développement international du Royaume-Uni (DFID).
Avec l’aide de ces partenaires, Jacaranda Health a testé une liste de vérification de suivi post-partum à domicile au Kenya. La liste de vérification consistait en une série de questions de dépistage que les agents de santé communautaires (ASC) posaient aux mamans par téléphone ou en personne, deux jours après l’accouchement, assurant ainsi une transition sécuritaire de l’hôpital à la maison. La liste de vérification aidait les ASC à repérer tôt les signes de danger et à envoyer la patiente en consultation. Encadrés par des infirmières, les ASC conseillaient également les nouvelles mères sur l’importance de rechercher des soins à temps et de surmonter les obstacles qui rencontrent couramment les femmes à faible revenu lorsqu’elles cherchent à obtenir des soins, tels que le manque de transport, les frais d’hospitalisation et la prise de décision avec leur mari après la naissance.
Les résultats montrent que lorsque les agents de santé détectaient des risques potentiels, les mères étaient presque deux fois plus susceptibles de retourner à la clinique pour obtenir des soins que les autres mères. Jacaranda a pu réduire les risques pour la santé, promouvoir un comportement post-partum sain et assurer une transition sécuritaire vers la maison durant les quelques journées critiques après l’accouchement, y compris l’utilisation de la planification familiale post-partum. Les femmes qui ont reçu un appel ou la visite d’un ASC étaient 86 % plus susceptibles d’utiliser une méthode de planification familiale de leur choix à 9 semaines suivant la naissance par rapport à celles qui n’ont fait l’objet d’aucun suivi.
Au Nigeria, avec l’aide d’une subvention du programme Sauver des vies à la naissance, le Centre de projets de recherche pour le développement a mobilisé des leaders d’opinion islamiques conservateurs influents dans les régions du Nord du pays afin qu’ils participent à des débats visant à remettre en question leurs perceptions sur la vaccination et l’espacement des naissances, qui propagent des messages décourageants parmi leur fidèles. Au total, 28 érudits et 100 apprentis ont participé, conduisant à un changement dans leurs perceptions et leurs prises de position sur des questions de santé maternelle et infantile, qui les a amenés à favoriser la vaccination et l’espacement des naissances. En plus de leurs sermons réguliers, ces érudits ont organisé des émissions de radio et participé à des campagnes de vaccination, exposant 8 millions de personnes à leurs messages de promotion de la santé. Le Centre se concentre désormais sur la formation côte à côte d’érudits islamiques et de prestataires de soins de santé afin de hausser la qualité des soins et de l’information reçue par les familles en vue d’intensifier la vaccination et les pratiques de planification familiale dans la région.
Dans les districts autochtones du Guatemala central, les accouchements à domicile sont encore la norme, et 60 à 90 % des naissances ont lieu à la maison. Malgré la présence d’établissements de soins ouverts 24 heures sur 24 dans la région, les femmes autochtones ignorent les cliniques parce que les soins y sont souvent de mauvaise qualité et insensibles à leurs valeurs culturelles. À la lumière des résultats positifs d’un essai randomisé par grappe, qui a révélé un gain significatif (augmentation relative de 10 %) du nombre de naissances, les équipes de CIESAR Guatemala et PRONTO International s’affairent à déployer une série d’interventions dans 33 collectivités. Ce travail permettra d’assurer une couverture complète de ces interventions dans deux départements du Guatemala, en visant à promouvoir les naissances en établissement par une campagne de marketing social ayant fait ses preuves; lorsque les femmes se présenteront dans un établissement, elles seront prises en charge par des accoucheuses traditionnelles et formelles ayant reçu une formation en soins obstétricaux d’urgence tenant compte des désirs et des besoins des femmes autochtones. Ce programme est en voie de déploiement.
Puisque la mortalité maternelle est attribuable à la non disponibilité, à l’inaccessibilité, au coût élevé ou à la mauvaise qualité des soins, Grands Défis Canada aide à réduire la mortalité maternelle en appuyant de nombreuses autres innovations dans le cadre de plusieurs programmes et partenariats. Notre initiative Sauver des cerveaux soutient des idées audacieuses visant à améliorer le développement précoce du cerveau et de l’enfant dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Le portefeuille comprend des innovations, la prestation d’un soutien par les pairs pour les mères, et l’amélioration du bien-être des soignants. Le programme La Santé mentale dans le monde vient en aide avec des projets de prise en charge de la dépression maternelle, en tentant d’éliminer toutes les formes de violence contre les femmes et les filles et de créer un environnement sain et sécuritaire pour les naissances.
Les taux de mortalité maternelle et infantile ont chuté de façon spectaculaire. Mettre fin aux décès évitables de mères et de bébés en une génération est maintenant à notre portée, et les pays en développement assument un rôle croissant de chef de file dans ce domaine. Cependant, malgré les progrès accomplis, il reste beaucoup de chemin à parcourir. Avec le soutien du gouvernement canadien, Grands Défis Canada continue de cerner et d’appuyer des innovations dans le cadre de ses programmes et de ses partenariats.
Lisez notre autre blogue pour la Fête des mères 2015, intitulé « L’histoire de la Fête des mère de Kristen (Canada) et de Christian (Colombie) ».
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