La Journée mondiale du paludisme, qui a eu lieu le 25 avril, constitue un moment opportun pour sensibiliser davantage les gens au problème du paludisme. Cette année, le thème choisi est « Investir dans l’avenir. Vaincre le paludisme ».
Environ 3,4 milliards de personnes – la moitié de la population mondiale – sont à risque de contracter le paludisme. Il est l’une des principales causes de mortalité prématurée dans le monde, en particulier chez les enfants de moins de cinq ans. En 2012, il y a eu environ 207 millions de cas de paludisme, et environ 627 000 décès ont été causés par cette maladie. Les personnes vivant dans les pays tropicaux sont les plus vulnérables parce que le moustique qui transmet le parasite du paludisme prolifère dans ces régions. En 2012, 90 % des décès dus au paludisme sont survenus dans la Région africaine de l’OMS, la plupart chez les enfants de moins de 5 ans. Les efforts déployés dans le monde pour contrer et éradiquer le paludisme ont permis de sauver quelque 3,3 millions de vies depuis 2000. L’apparition d’une résistance aux médicaments et insecticides menace d’anéantir les progrès récents.
Le Canada a fait preuve de leadership en vue de sauver et d’améliorer la vie des femmes et des enfants des pays en développement dans le cadre de l’initiative de Muskoka. Freiner le paludisme est un volet crucial de cette initiative. Grands Défis Canada, dont le financement provient du gouvernement du Canada, participe à l’effort mondial pour vaincre la maladie en investissant dans des idées audacieuses ayant grand impact. Nous soutenons un total de 40 innovations qui ciblent le paludisme. Nous avons engagé plus de 12 millions de dollars pour lutter contre cette importante menace à la santé mondiale.
Même si plusieurs de ces innovations en sont au stade embryonnaire, nous commençons à en voir les premiers résultats. Ainsi, à Nairobi (Kenya) dans le quartier de Kibera – l’un des plus grands bidonvilles d’Afrique – la mise en place d’un système standardisé et intégré de dossiers médicaux pour les patients qui relie et consolide les services de santé a permis d’étendre l’accès au diagnostic et au traitement du paludisme à 7 400 personnes et de former 50 médecins. Jusqu’à présent, 50 000 personnes dans ce bidonville ont été mises au courant de la disponibilité de ce système.
Les stratégies recommandées par l’OMS pour lutter contre le paludisme englobent : la prévention avec des moustiquaires imprégnées d’insecticide de longue durée et la pulvérisation des espaces intérieurs; les tests de diagnostic et les traitements avec des médicaments anti-paludisme de qualité assurée; les traitements préventifs pour les nourrissons, les enfants et les femmes enceintes; le suivi de chaque cas de paludisme dans le cadre d’un système de surveillance; enfin, l’intensification de la lutte contre la résistance émergente aux médicaments et insecticides. Environ 19 % des innovations classées sous la rubrique « maladies infectieuses » dans le portefeuille des Étoiles en santé mondiale touchent au paludisme.
Prévention de l’infection
La première étape dans la lutte contre le paludisme est la prévention des piqûres de moustiques. Les avantages de l’utilisation des moustiquaires imprégnées d’insecticide de longue durée dans la prévention du paludisme sont bien connus et, lorsqu’elles sont utilisées correctement, elles préviennent près de 80 % des cas d’infection de paludisme. L’autre 20 % des transmissions se produit à l’intérieur et à l’extérieur avant que les gens aillent se coucher.
Grands Défis Canada appuie des innovateurs qui développent plusieurs stratégies visant à compléter l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticide de longue durée pour éviter les piqûres de moustiques qui transmettent le paludisme; voici quelques exemples :
Vêtements de protection
- La société A to Z Textile Mills développe une technologie de protection personnelle contre les maladies à transmission vectorielle (comme le paludisme) par un traitement innovant des vêtements avec de nouveaux insecticides plus sécuritaires qui doivent faire l’objet de tests;
- Des chaussures fabriquées avec un matériau imprégné d’un chasse-moustique qui améliorera la protection aux endroits (en plein air) et aux moments (en début de soirée) où les moustiquaires actuelles ne peuvent être utilisées. Élaboré par l’Ifakara Health Institute (Tanzanie).
La pulvérisation des espaces intérieurs
- La société Med Biotech Laboratories (MBL), de l’Ouganda, forme les villageois à mélanger des insecticides avec des matériaux de plâtre disponibles localement pour en faire un plâtre insecticide qui est ensuite appliqué sur les murs de boue des huttes.
Modification des logements
- Des innovateurs de l’Université Maseno (Kenya) sont en train de modifier des maisons rurales typiques en y installant un plafond ventilé fait de nattes locales. Cela rendra plus difficile pour les vecteurs du paludisme d’entrer et de rester dans la maison, ce qui réduira la transmission du paludisme.
- Les riziculteurs de subsistance itinérants vivent souvent dans des cabanes improvisées semi-ouvertes où ils sont exposés de façon disproportionnée aux piqûres de moustiques infectieux par comparaison avec le reste de la population. L’Ifakara Health Institute (Tanzanie) travaille à la conception de huttes portables à coût modique qui seraient à la fois résistantes au feu et à l’épreuve des moustiques pour prévenir les maladies transmises par les vecteurs, ce qui devrait augmenter la productivité des ménages de ces agriculteurs itinérants.
Lutte contre les moustiques à l’extérieur
- Grâce à un autre projet cofinancé par la Fondation Bill & Melinda Gates, l’Ifakara Health Institute élabore un dispositif innovateur pour attirer et tuer les moustiques qui transmettent le paludisme à l’extérieur des maisons.
Essais de nouveaux insecticides
- Université Kenyatta (Kenya) fait des recherches sur un nouveau mélange d’insecticides anti-moustiques.
- À l’aide de plantes médicinales du Kenya et du Nigeria, un projet dirigé par l’Université d’agriculture et de technologie Jomo Kenyatta vise à produire un phytomédicament abordable, accessible et efficace, pouvant être distribué tel quel, afin d’éviter les piqûres de moustiques. (Kenya, Nigeria)
- Un projet de l’Ifakara Health Institute, en Tanzanie, vise à réduire les piqûres de moustiques de 80 % en utilisant des fibres de sisal produites localement et traitées avec de la transfluthrine.
Vaccins et nouveaux médicaments
- L’Université Laval utilise des nanoparticules dérivées du virus de la mosaïque de la papaye (PapMV-NP) comme adjuvant pour un vaccin antipaludique sûr, efficace et peu coûteux.
- L’International Centre for Genetic Engineering & Biotechnology (Inde) développe de nouveaux vaccins qui bloque l’entrée d’un parasite du paludisme (P. vivax) dans les globule rouge humaines en vue de réduire le fardeau de la maladie.
Le contrôle biologique des moustiques
- L’Université d’Abomey-Calavi projette de développer un contrôle durable et non chimique des vecteurs du paludisme par l’utilisation d’un nématode (Romanomermis iyengari). (Bénin)
- La spectroscopie du proche infrarouge peut différencier rapidement, simultanément et de façon non destructive l’âge et l’espèce d’Anopheles gambiae et d’An. arabiensis. L’Ifakara Health Institute (Tanzanie) applique cette technologie pour réduire / retirer les moustiques potentiellement infectieux dans une population.
Tests de diagnostic et de traitement avec des médicaments antipaludiques de qualité assurée
Tests de diagnostic
Les tests et la détection précoce du paludisme sont essentiels pour éradiquer la maladie. Grands Défis Canada appuie de nombreux innovateurs qui développent des approches et des dispositifs de diagnostic innovateurs.
Tests rapides spécifiques pour le paludisme
- L’Université de Toronto offre un test peu coûteux utilisant des microélectrodes nanostructurés pour détecter avec une grande sensibilité et spécificité le paludisme dans des échantillons de sang non purifié. (Tanzanie)
- Le Kenya Medical Research Institute développe un test non invasif qui permet de détecter et de quantifier les parasites du paludisme dans la salive. Mis en application au Kenya et au Nigeria.
- Un projet géré par Ustar Biotechnologies Ltd. (Chine) a permis de mettre au point un dispositif simple, rapide et abordable d’extraction des acides nucléiques, ainsi qu’un test d’amplification isotherme des acides nucléiques pouvant être utilisés au niveau du village par du personnel peu qualifié.
- Un projet entrepris au Vietnam par le National Hospital for Tropical Diseases vise à développer un composant microfluidique du ‘patient-à-la-puce’ pour la collecte et la transformation de sang total en plasma et cellules pour les essais en aval axés sur des maladies tropicales très répandues.
- Des innovateurs de l’Université de l’Alberta ont remanié le tube capillaire classique pour la collecte de sang en un dispositif de diagnostic qui intègre la collecte de sang total avec des tests moléculaires pour détecter le paludisme. Un prototype a été développé.
- Un projet de l’Ifakara Health Institute (Tanzanie) vise à introduire de nouvelles technologies médicales en ligne qui fournissent des diagnostics précis et une meilleure gestion des patients au point de traitement permettant la déclaration électronique immédiate des cas dans les milieux à faibles ressources et une amélioration de l’efficacité du système de soins de santé et de meilleurs résultats en santé publique.
- La société Neurosynaptic Communications Private Limited (Inde) développe un dispositif de diagnostic à distance offrant un bon ratio coût-efficacité qui permet à du personnel aux compétences limitées d’effectuer plusieurs tests, rendant les diagnostics abordables et accessibles aux populations rurales.
Test de diagnostic multiplexé
En plus de tests individuels, des innovateurs développent des technologies permettant de diagnostiquer plusieurs affections, notamment le paludisme, à l’aide d’une plateforme.
- La société Achira Labs Pvt. Ltd. (Inde) utilise le tissage pour développer une plateforme de fabrication de Fabchips (puces en tissu) pouvant être utilisée pour effectuer des tests de diagnostic rapides, peu coûteux et multiplexés.
- L’International Centre of Insect Physiology and Ecology (Kenya) utilise des vers à soie pour produire des protéines servant au diagnostic de plusieurs agents pathogènes dont les symptômes s’apparentent et mettre au point une trousse de diagnostic pour de multiples maladies.
- L’Université de Toronto développe un outil de dépistage sanguin à base de levure, prêt à l’utilisation, pour la détection simultanée de combinaisons de maladies; le projet est mis en œuvre au Belize et en Jamaïque. Tout comme la levure de boulangerie, il peut être entreposé à sec et produit localement avec un minimum de matériel / formation, améliorant ainsi l’accessibilité dans les régions rurales.
- L’objectif d’un projet, dirigé par l’Université de l’Alberta et mis en œuvre au Nigeria et au Pakistan, est de développer des dispositifs de diagnostic de la maladie au point de traitement capables d’identifier de multiples biomarqueurs pour une seule maladie. Ce dispositif offrira un bon ratio coût-efficacité et pourra être utilisé facilement par des personnes ayant peu ou pas de formation, tout en contrant le surtraitement de la maladie.
Traitement avec des médicaments antipaludiques de qualité assurée
La distribution d’antimicrobiens aux patients qui en ont besoin permettrait d’éviter des millions de décès annuellement, tout en évitant une consommation inutile afin de réduire la résistance aux antimicrobiens.
- Un projet dirigé par des innovateurs thaïlandais (Université Mahidol) vise à déterminer si les niveaux de procalcitonine permettent de prédire la nécessité de recourir à des antimicrobiens pour lutter contre des maladies tropicales, comme le paludisme. (Cambodge, République démocratique du Congo, Laos, Nigeria, Rwanda, Tanzanie)
- L’Université des sciences de la santé Muhimbili (Tanzanie) utilise le transport par moto, qui est en plein essor en Tanzanie, dans le cadre d’un projet visant à s’assurer que les antipaludiques atteignent les plus démunis afin qu’ils aine accès à des médicaments efficaces dans les régions rurales reculées, où le fardeau du paludisme est le plus lourd.
- Trouver de nouveaux traitements pour le paludisme à partir de médicaments existants : la plupart des médicaments ont de multiples effets médicaux. Recibler des médicaments existants approuvés vers des maladies négligées permet d’abaisser les coûts, de réduire les délais de développement et de rendre les traitements accessibles aux pays en développement. Chematria Inc. (Inde)
- L’artémisinine, extraite de la plante Artemisia annua, est utilisé comme médicament de première ligne pour lutter contre le paludisme. Un projet de la société Botanical Extracts EPZ Limited (Kenya) vise à augmenter le rendement de l’artémisinine tirée de l’Artemisia.
- L’Université de Nairobi (Kenya) travaille à la création d’une base de données in silico sur le Web pour les produits naturels du Kenya qui feront l’objet d’une sélection virtuelle pour être utilisés dans la lutte contre le parasite du paludisme. Les résultats de cette sélection virtuelle seront ensuite synthétisés et optimisés pour produire une action maximale contre le paludisme.
- Un projet de l’Université MOI (Kenya) vise à améliorer l’accès aux médicaments, y compris les médicaments contre le paludisme, grâce à un modèle de pharmacies à fonds renouvelables. Avec la collaboration des collectivités et du gouvernement, ces pharmacies offrent des médicaments de qualité à bas prix. Les recettes sont ensuite utilisées pour reconstituer les pharmacies de manière durable, ce qui a un impact positif sur la santé de la collectivité.
- Au Bangladesh, au Ghana et en Tanzanie, des innovateurs de l’Université Mahidol (Thaïlande) tentent de déterminer si un traitement précoce au niveau de la collectivité des cas appréhendés de paludisme grave permet de réduire les complications neurologiques à long terme chez les enfants ayant survécu à un tel épisode.
- Le Réseau universitaire de santé mène des essais pour déterminer si l’utilisation d’agonistes PPARγ, un médicament contre le diabète, dans le traitement du paludisme cérébral permet de réduire et de réparer les lésions cérébrales. Lire le commentaire de l’innovatrice Lena Serghides sur le blogue d’invité.
Approbation réglementaire
- A project by the London School of Hygiene & Tropical Medicine is supporting the harmonization of regulatory approval of diagnostic devices in the developing world. Results so far indicate willingness of members of the East African community to harmonize diagnostics.
Thérapies préventives pour les nourrissons, les enfants et les femmes enceintes
Traitements préventifs pour les mères
Le paludisme pendant la grossesse est un sérieux problème de santé publique qui menace la vie de la mère et du fœtus. Chaque année, plus de 60 % des femmes enceintes sont à risque d’infection dans le monde. L’exposition au paludisme dans l’utérus conduit à des mortinaissances et des naissances prématurées, et peut avoir un profond impact sur le développement précoce du cerveau.
- Des scientifiques de l’Université de l’Alberta étudient comment des anticorps masculins peuvent protéger les femmes enceintes contre le paludisme au Bénin et en Colombie. L’intégration d’analyses en laboratoire et sur le terrain permettra de valider une nouvelle stratégie de vaccin contre le paludisme pendant la grossesse.
- Le Réseau universitaire de santé a entrepris un projet au Malawi portant sur une politique novatrice de soins prénatals qui concentre les ressources sur le diagnostic précis du paludisme au point de traitement et la gestion efficace des cas d’infection en vue de réduire le fardeau du paludisme durant la grossesse et de protéger le développement précoce du cerveau.
Suivi de chaque cas de paludisme dans le cadre d’un système de surveillance
- L’Initiative des dossiers médicaux de Kibera a montré d’excellent résultats, permettant à 7 400 personnes par mois d’utiliser un système standardisé de dossiers médicaux des patients qui relie et renforce les services de soins de santé dans l’un des plus grands bidonvilles d’Afrique, situé à Nairobi (Kenya). Ce système facilite l’accès aux soins médicaux pour des maladies comme le paludisme. Plus de 50 membres du personnel médical ont été formés à utiliser ce système. Université de l’Alberta (Kenya)
- La University of the Philippines Development Foundation Inc. (Philippines) met en place un système de téléparasitologie médicale (appelé ctrl.para.site) qui met en lien les laboratoires périphériques aux Philippines avec des experts grâce aux technologies de l’information et des communications. Cette initiative permet d’améliorer l’accès au diagnostic et au traitement, de renforcer les capacités et de mettre à jour les données sur les maladies tropicales négligées.
Intensification de la lutte contre la résistance montante aux médicament et aux insecticides
- La résistance aux médicaments est une cause majeure de décès dus au paludisme. L’Université de Calgary mène un projet au Cameroun visant à contrer la résistance aux médicaments en ciblant un chaperon moléculaire appelé Heat Shock Protein 90, le régulateur principal de la réponse au stress du parasite.
- Manipuler chimiquement le cours de l’évolution de la résistance aux médicaments chez les parasites du paludisme est l’objectif visé par l’Université Mahidol (Thaïlande), dans le but ultime d’éviter que des médicaments antipaludiques ne soient perdus en raison de parasites multirésistants mortels.
L’innovation consiste à « investir dans l’avenir ». Grands Défis Canada, dont le financement provient du gouvernement du Canada, est fier d’appuyer un portefeuille aussi solide et diversifié d’innovations qui pourraient aider à réduire le fardeau du paludisme et à sauver et améliorer la vie de femmes et d’enfants.
Join the conversation on Twitter by using hashtag #WorldMalariaday. We encourage you to post your questions and comments about this blog post on our Facebook page Grand Challenges Canada and on Twitter @gchallenges